Sylvie Bourcier, consultante en petite enfance
Octobre 2014
www.aveclenfant.com
D’abord, ne pas dramatiser
Avant l’âge dit « de raison », 7-8 ans l’enfant confond la réalité et ses désirs, l’imaginaire et la réalité. Il est normal qu’il altère la réalité selon ses désirs. On parle davantage d’affabulations que de vrais mensonges qui sont dits dans le but conscient de tromper l’autre. Il faut d’abord écouter pour comprendre ce qui se cache derrière la fable puis exprimer votre doute ou ce que vous ressentez face à la situation. « Je suis déçue de … et je pense pas que ce soit le chat qui … ».
L’enfant peut trafiquer la vérité pour préserver une bonne image de lui. Il exagère un exploit pour impressionner ou invente une histoire dans laquelle il a réussi lorsqu’il est confronté à une difficulté. L’adulte doit donc au quotidien souligner les petites réussites et exprimer sa confiance envers l’enfant. « Je sais que tu travailles fort, tu vas réussir … » « Tu aimerais être fort comme papa. En grandissant, tu deviendras toi aussi un homme. » …
Attention aux punitions
L’enfant qui sait que tel ou tel comportement entraînera une punition peut nier afin d’éviter de se faire gronder. Il n’a pas l’intention de tromper, ni de blesser l’autre. Il ne pense qu’à lui. L’attitude de l’adulte est déterminante. S’il se fâche, blâme l’enfant ou le traite de maladroit, il encourage le petit à réutiliser ce réflexe à l’avenir.
L’humour et l’imagination demeurent des atouts de taille pour régler la situation. Nadine, toute barbouillée de chocolat tente de convaincre sa mère qu’elle n’a pas manger de biscuit. « J’ai rien mangé maman ». « Ce rien devait goûter le chocolat, regarde ta bouche » réplique la mère.
Il est aussi important d’aider le petit Pinocchio à prendre conscience des conséquences de sa bévue et de la réparer lorsque c’est possible. « Je n’ai pas brisé la construction en legos d’Émile. C’est Gros Gorille qui a lancé le ballon dessus. » On fait remarque qu’Emile est fâché, déçu et qu’il doit avec son ami Gros Gorille ramasser et rendre les blocs. Il aura à refaire la tour si Émile le souhaite.
Sanctionner l’enfant de façon excessive, le traiter de menteur ne ferait qu’aggraver la situation. Féliciter le courage de celui qui dit la vérité et lui dire que reconnaître que l’on a fait une bêtise est la meilleure façon d’éviter de la recommencer.
Trafiquer la vérité est aussi pour l’enfant une occasion d’expérimenter son lien avec l’adulte. Vers 4-5 ans, l’enfant prend conscience qu’il a ses propres pensées si elles sont connues de ses parents.
Il fait l’exploration des conséquences de son mensonge. Mes parents seront-ils incrédules ? Me trouveront-ils rigolo ? Se fâcheront-ils ? La fantaisie du petit se heurte alors à la réalité des conséquences. Peu importe la gravité du mensonge, selon le sens moral de l’adulte, la réaction des adultes ne doit en aucun cas fragiliser ce qui est le plus important pour l’enfant, son lien d’amour avec ses parents. C’est pourquoi pardonner, oublier, laisser-aller sans confronter sont de mise avec le petit en plein apprentissage de la réalité et du sens moral.
Pour en savoir plus :
Les vérités de Pinocchio dans Comprendre et guider le jeune enfant à la maison, à la garderie. Sylvie Bourcier, Éditions CHU Sainte-Justine, 2004, p. 44 à 50.
Dolloz, Danielle (2006) Le mensonge. Éditions Bayard.