Mon enfant est-il amoureux de moi?
Émile a 4 ans. Sa mère Marika le décrit comme son grand garçon : beau, curieux, drôle et intelligent. Elle passe beaucoup de temps avec lui car son père travaille beaucoup. Depuis quelques semaines, Émile demande à sa mère pour prendre son bain avec elle. Il a essayé de lui toucher les seins à quelques reprises. Marika ne sait pas trop quoi en penser. Il vient la retrouver la nuit dans son lit. Lorsque ses parents s’assoient sur le divan, Émile vient s’asseoir entre eux. Marika demande en riant à l’éducatrice d’Émile s’il est possible qu’il soit amoureux d’elle.
Le complexe d’Œdipe
Ce qu’Émile vit ressemble beaucoup au complexe d’Œdipe. Vous avez peut-être déjà entendu parler de ce concept en psychologie, un des plus connus par le grand public. Le complexe d’Œdipe est une phase développementale tout à fait saine qui se déroule habituellement entre 3 et 5 ans. Le complexe d’Œdipe est une attirance amoureuse que ressent le garçon envers sa mère. Le complexe d’Électre est une attirance amoureuse que ressent la fille envers son père. Cependant, vous trouverez généralement dans vos lectures le complexe d’Œdipe comme référant au sexe des deux enfants, sans distinction, c’est-à-dire autant l’attirance du garçon envers sa mère que l’attirance de la fille envers son père.
Pourquoi le complexe d’Œdipe?
Le complexe d’Œdipe survient car l’enfant commence à ressentir des émois tant amoureux que sensuels et il se tournera vers l’objet d’amour le plus près de lui, généralement le parent de sexe opposé. Pour que l’enfant en vienne à vivre le complexe d’Œdipe, il doit avoir traversé les étapes développementales qui précèdent. Il doit avoir bâti une confiance envers ses parents, une certaine maîtrise de lui-même et du monde qui l’entoure, une confiance en lui suffisante pour se croire digne d’aimer et d’être aimé. Ces étapes n’ont pas besoin d’avoir été franchies de manière totalement satisfaisante mais elles doivent l’avoir été suffisamment pour que l’enfant ait confiance en l’amour du parent qu’il tentera de séduire, une maîtrise de ses élans car l’enfant s’en tiendra habituellement à des bisous et câlins envers le parent convoité, puis qu’il croit qu’il lui est possible de séduire le parent qu’il souhaite et ainsi, supplanter l’autre parent, et donc ressortir victorieux de la rivalité avec le parent de même sexe.
Comment se manifeste le complexe d’Œdipe?
Il importe tout d’abord de préciser que l’intensité des manifestations du complexe d’Œdipe peut être grandement variable. Ainsi, certains enfants vivent leur complexe d’Œdipe sans que leurs parents ne s’en aperçoivent. Pour d’autres, par contre, c’est vécu de manière très intense et c’est d’ailleurs un des premiers motifs pour lesquels des parents me consultent en bureau.
- Manifestations explicites
- L’enfant veut embrasser son parent sur la bouche
- L’enfant cherche à voir la nudité de son parent
- L’enfant cherche à faire des caresses au parent
- L’enfant se dit l’amoureux ou l’amoureuse de son parent
- L’enfant fait part de ses plans de marier son parent quand il sera grand
- Manifestations implicites
- L’enfant se colle physiquement sur son parent pendant une période de temps importante
- L’enfant recherche une relation exclusive avec son parent
- L’enfant écoute très bien les consignes du parent convoité
- L’enfant se rebelle face au parent rival
- L’enfant s’immisce entre les parents lorsque ceux-ci sont en proximité
- L’enfant cherche l’attention des parents lorsque ceux-ci discutent seul à seul
- L’enfant refuse de dormir dans son lit
- L’enfant se relève souvent alors que c’est l’heure de se coucher car alors, il peut espionner ses parents et leur intimité
Que faire si mon enfant vit son complexe d’Œdipe?
Entre 3 et 5 ans, c’est une phase considérée comme normale du développement de l’enfant. Cependant, le complexe doit aussi se résoudre car sinon, l’enfant et l’adulte qu’il deviendra pourrait vivre des difficultés dans ses relations affectives. Il importe de ne pas rire de l’enfant ni de ses tentatives de séduction. La mère peut par exemple dire à son garçon qu’elle l’aime comme son grand garçon mais que son père demeure son amoureux. De son côté, le père a aussi un rôle à jouer avec son garçon en se posant comme un modèle positif auquel s’identifier et en développant avec lui une complicité au lieu d’une rivalité.