Sylvie Bourcier, intervenante en petite enfance
Octobre 2010
www.aveclenfant.com
Les médias font état de la réalité criante de l’épuisement professionnel des enseignantes surchargées de travail. L’absence de ressources professionnelles, l’intégration d’enfants manifestant des besoins particuliers, la violence sont dénoncées et expliquent en bonne partie cet épuisement associé au travail. Bien que plusieurs études[1] suggèrent que le niveau d’épuisement professionnel des éducatrices n’est pas plus élevé que la moyenne, on ne peut négliger le fait que ces travailleuses sont en contact avec de nombreuses situations potentiellement stressantes qui peuvent s’apparenter à celles vécues par les enseignantes.
Le Conseil canadien sur l’apprentissage[3] situe à 1 adulte pour 3 enfants jusqu’à 2 ans, 1 pour 6 enfants de 2 à 3 ans et 1 adulte pour 8 enfants d’âge préscolaire; le ratio idéal soit celui qui est associé à un développement cognitif, social plus élevé en 1ère année. Comme nous le savons au Québec le rapport est 1;5 pour les poupons, 1;8 pour les enfants de 18 mois à 4 ans et 1 :10 pour les 4 ou 5 ans en installation et 1 :6 en milieu familial où l’on retrouve le multiâge.
Il est parfois difficile pour l’éducatrice de se sentir satisfaite du travail qu’elle accomplit. Comment se sentir compétente dans autant de domaines? Les tâches sont multiples et d’une grande diversité et elles font appel à de nombreux champs de compétence : pédagogie, psychologie du développement de l’enfant, sociologie de la famille, parfois quelques brides de médecine familiale et beaucoup de communication humaine. Elle doit dépister, sensibiliser, référer. Elle travaille avec son corps, son cœur et son intelligence dans une zone où le doute fait partie du quotidien. Car l’éducation n’est pas une science exacte où le savoir à réponse à tout. La relation est l’outil de travail. Dans cette relation, l’éducatrice est partie prenante. Elle s’engage pour l’enfant. Il est nécessaire que cette implication soit reconnue et soutenue.
Dans les milieux, où l’on tient des réunions d’équipe dans lesquelles les éducatrices ont l’occasion de s’entraider, d’échanger, on retrouve un haut niveau de satisfaction au travail.[4] Les études sur le stress et le burnout soulèvent l’importance du réseau social. Il a un rôle de médiateur et de protection. Échanger réduit le sentiment d’être seul à vivre le découragement, favorise le partage de moyens pour faire face aux stresseurs. Réunions d’équipe, accessibilité à une conseillère pédagogique, participation à des tables de concertation, à des comités, tous les moyens de prévention sont à envisager. Il faut que les éducatrices aient accès à un lieu de paroles où elles se sentiront accueillies, reconnues.
Ce support affectif et concret (instrumental) n’est pas un luxe, c’est une nécessité si nous voulons maintenir des services de qualité aux enfants. L’éducatrice supervisée, encouragée et soutenue a de fortes chances de se sentir compétente, satisfaite à son travail, énergisée. Convaincue qu’en s’investissant à son travail, elle pourra s’accomplir, elle se mobilisera, demeurera motivée à déployer toutes ses habiletés et compétences et se fera une joie de voir les enfants se développer au sein de son groupe.
[1] Études de Tessier, R. et Tessier, R., Dion, G. et Mercier C., citées dans Apprentissage et socialisation, volume 12, no. 4, décembre 1989, p. 205-215. Article de Guylaine Dion intitulé Le burnout chez les éducatrices en garderie : proposition d’un modèle théorique.
[2] Pines, A.M., Aronson, E., Kafry, D., Burnout. Se vider dans la vie et au travail. 1982. Éditions Le Jour, chap. 6.
[3] Tiré du Carnet du Savoir. Pourquoi les services de garde de haute qualité sont-ils essentiels? (www.ccl.cca.ca)
[4] Pines, A.M., Aronson, E., Kafry, D., Burnout. Se vider dans la vie et au travail. 1982. Éditions Le Jour, chap. 6.