Il y a quelques mois, j’ai écrit un texte au sujet des interactions de qualité entre les enfants et les adultes. Accompagner l’enfant, c’est aller où il va dans ses apprentissages ! – Avec l’enfant (aveclenfant.com).
Comment augmenter la qualité de ses interactions avec l’enfant ? C’est la question à laquelle je réponds en 3 points.
- Donnez-lui des occasions variées d’interagir, d’utiliser et de développer son langage.
- Poursuivez l’interaction en lui offrant des réponses qui suscitent son engagement et sa persévérance dans l’apprentissage. Favorisez chez lui une compréhension plus élargie de son environnement et de son vécu.
- Permettez-lui de s’engager dans un processus de création, de raisonnement, de réflexion puis d’analyse à travers vos échanges et diverses opportunités d’apprentissage qui se présentent.
Or, dans cette première partie, je partage des moyens concrets permettant à l’adulte de saisir les occasions variées de soutenir les interactions et l’utilisation du langage chez l’enfant (point 1). Dans cette seconde partie, je souhaite proposer quelques stratégies permettant à l’adulte d’offrir à l’enfant des rétroactions qui suscitent son engagement et sa persévérance dans l’apprentissage, favorisant ainsi sa compréhension (point 2). Également, des stratégies permettant à l’adulte d’offrir des rétroactions qui guideront l’enfant vers un processus de création, de raisonnement, de réflexion et d’analyse (point 3) seront présentées.
L’adulte, qui s’engage dans des interactions de qualité auprès de l’enfant, crée de nombreuses circonstances d’engager l’enfant dans ses apprentissages puis de soutenir ses habiletés cognitives. Ici, il faut comprendre le soutien de l’adulte comme celui d’un guide, d’un accompagnateur, et non comme un transmetteur de savoirs ou de l’enseignement d’une leçon avec la méthode « par cœur ».
Bien sûr, tout adulte attentif et à l’écoute des enfants répondra spontanément à ses questions. Mais dans l’objectif de soutenir les habiletés de raisonnement, de réflexion, d’analyse, de création, etc., il est intéressant d’utiliser ce que j’appelle « le miroir ». Il s’agit de refléter à l’enfant sa question (par exemple, lui relancer sa question : « Pourquoi la glace est-elle dure, selon toi? ») au lieu de lui donner une réponse systématique (« Parce que l’eau est gelée. ») qui ne favorisera pas le maintien de l’interaction et sa réflexion. À ce moment, vous lui permettez de tenter de trouver seul la réponse. Hé oui! Parfois, les enfants posent des questions auxquelles ils connaissent déjà les réponses. Ils ont alors simplement besoin de validation. Cette manière de maintenir les interactions permet de garder l’enfant engagé dans son processus d’apprentissage et vous donne également des indices sur le degré d’aide à lui apporter.
En effet, s’il tente une réponse, vous aurez l’occasion de valider, de compléter, de le questionner sur sa réponse, sur sa pensée, ou de lui demander de l’expliquer dans d’autres mots. Ce sera également une bonne occasion d’incorporer des informations au sujet qu’il connaît déjà (« Les blocs de bois que tu as utilisés pour ton château sont aussi solides »), de bonifier l’affirmation de l’enfant à l’aide de qualificatifs et de descriptions (« La glace est solide, froide et transparente »), d’utiliser un vocabulaire plus soutenu et d’expliquer les nouveaux mots (« La glace est étincelante. Ça veut dire qu’elle brille. »), de faire des comparaisons et des classifications (« C’est solide comme quoi ? Comme le verre ») et/ou de faire des associations avec son vécu familial ou au service de garde (« C’est de la glace tout comme celle sur laquelle nous avons patiné au parc. »), et ce, à partir de l’interaction qu’il aura lui-même amorcée.
D’ailleurs, il serait judicieux de poursuivre l’interaction à l’aide de questions ouvertes. Par exemple, l’enfant vous demande : « Pourquoi…? ». Vous lui répondez : « Pourquoi, selon toi ? ». L’enfant vous explique son point de vue. Vous lui répondez : « Et comment penses-tu que cela se produise ? ». Etc. Cette stratégie peut être utilisée dans divers contextes, comme lorsque l’enfant vous demande de l’aide. Vous pouvez le questionner : « Comment faire selon toi? » « Que se passera-t-il si tu le fais de cette manière ? », etc. Ces dernières questions amènent aussi l’enfant à raisonner, à analyser, à prédire, à résoudre des problèmes. Dans le même ordre d’idées, invitez l’enfant à expliquer ses actions, ses choix, sa pensée pour favoriser sa réflexion.
Ainsi, il revient à l’adulte de développer ce réflexe et de saisir diverses opportunités pour amener l’enfant plus loin dans ses apprentissages. Par exemple, demandez aux enfants avant une sortie dans la cour extérieure ou au parc, de planifier ce qu’il prévoit faire et de vous le nommer, de faire un remue-méninge sur des idées de jeux qui sont possibles de faire, d’évaluer ses choix et d’émettre des hypothèses (Que penses-tu qu’il arrivera ? Pourquoi ça fonctionne ? Pourquoi ça ne fonctionne pas ? Que peut-on faire la prochaine fois ?)
Une autre stratégie qui permet de maintenir l’engagement de l’enfant dans ses apprentissages est de reconnaître ses efforts, de remarquer ses tentatives de persévérance. Pratiquez le renforcement explicite tel que : « J’ai remarqué que tu as essayé une autre méthode. Tu trouveras la bonne, continue! ». Évitez les mots comme « Wow ! Bravo! Super! » qui n’offrent à l’enfant aucune rétroaction sur son effort. Si l’enfant se trouve face à un défi, n’hésitez pas à l’étayer. Vous pouvez lui donner des indices pour l’aider à réussir ce qu’il a entrepris, réduire le défi en accomplissant une partie de la tâche et en le laissant poursuivre par la suite, etc. Tout comme il est mentionné plus haut, évitez de lui donner systématiquement la réponse.
En terminant, maintenir des interactions de qualité ne veut pas dire de prendre le contrôle. Au contraire, c’est de rétroagir à l’amorce d’un enfant. C’est aussi de se laisser inspirer par l’enfant en ayant en tête l’intention d’élargir ses apprentissages et sa compréhension, et ce, en faisant preuve de persévérance avec l’enfant de manière à approfondir les sujets d’intérêts et non seulement de les explorer en surface. Cherchez à connaître sa pensée, sa vision du monde, sa compréhension, ses expériences. Vous verrez que vous en apprendrez beaucoup sur eux.
Il faut retenir également que certes les modalités d’apprentissage sont importantes (aménagement, matériel offert, etc.), mais ce qui importe davantage c’est la manière dont l’adulte les utilisera comme levier afin d’appliquer les diverses stratégies de soutien à l’apprentissage chez l’enfant. Cultivez les interactions et profitez des différentes occasions quotidiennes pour y incorporer une petite stratégie à la fois. Misez sur la qualité, la quantité viendra par la suite !
Par Sylvie Garceau, enseignante et formatrice